viande hallal, casher, et autre
Cet article est inspiré par une conversation (mouvementée) au cours de laquelle mon interloculteur me soutenait que "la viande hallal est plus pure car l'animal est égorgé, ça élimine les toxines"...
Alors soyons clairs, je ne vais pas porter de jugement sur l'aspect spirituel de l'abattage rituel : ce n'est pas le lieu et je ne suis pas du tout habilitée!
Par contre, en tant que vétérinaire, je peux essayer d'apporter des éléments d'information sur ce que recouvre le terme d'abattage rituel. Mes cours de sécurité sanitaire des aliments ainsi que ma visite de l'abattoir départemental commencent à dater un peu, je fais donc confiance aux vétérinaires sanitaires vacataires ou non des abattoirs pour corriger les éventuelles approximations.
Prenons l'exemple des bovins : un abattage, comment ça se passe?
les animaux arrivent à l'abattoir, ont un délai de repos légal (en bref, ils ne sont pas abattus dès leur descente de camion!) dans une stabulation attenante à l'abattoir. Le vétérinaire de l'abattoir fait ensuite une visite rapide des animaux, car les animaux visiblement malades ne rentrent pas sur la chaîne d'abattage.
Ensuite la chaîne d'abattage est lancée, au cours de laquelle les bovins sont assommés (avec une sorte de masse, avant on utilisait une sorte de pistolet à pointe qui perforait le crâne mais avec les histoires de vache folle, on ne touche plus l'encéphale pour ne pas risquer de contaminer la carcasse), ensuite suspendus sur des crochets, ensuite saignés, ensuite le cuir est retiré, les extrémités coupées, l'intestin ligaturé, ensuite vidés des organes internes, ensuite coupés en 2 dans le sens de la longueur, ensuite inspectés par le vétérinaire sanitaire qui appose un tampon indélébile sur la carcasse certifiant la conformité organoleptique de la viande. Ensuite les carcasses passent au frigo, et après une période de maturation différente selon les morceaux elles seront vendus. (entre parenthèses, les abats sont aussi inspectés).
Il faut savoir que ces différentes étapes sont extrèmement rapides et se réalisent à la chaîne, un technicien d'abattoir à chaque poste, de mémoire entre la percussion et la découpe en 2 de la carcasse c'est moins de 20 minutes (enfin, ça donne cette impression, quand on voit à la fin les 1/2 carcasses encore fumantes et avec des trémulations musculaires!).
A savoir : on ne peut pas saigner un animal mort! "saigner" veut dire vider le sang, si la pompe ne fonctionne plus (=le coeur), vous ne saignez pas grand chose et la viande a un aspect tout différent (pensez au gibier par exemple, si vous avez de la famille qui chasse). La viande bovine a beau être "rouge", elle est saignée comme la viande "blanche" du poulet. L'étape de percussion sert donc à rendre inconscient l'animal avant son égorgement.
Dans les abattoirs français, il y a une salle spécifique pour l'abattage rituel (juif et musulman). Cet abattage est supervisé par des responsables religieux de ces 2 religions -les rites sont similaires-, ils prononcent des prières durant l'abattage, des instruments spécifiques sont utilisés (c'est une sorte de sabre par exemple qui est utilisé pour l'égorgement dans le rituel juif), l'orientation spatiale des animaux est importante etc. A la fin, un tampon est apposé sur la carcasse certifiant le respect du code religieux lors de l'abattage, mais il faut savoir que c'est le tampon sanitaire qui prime (une carcasse "religieusement" conforme sera éliminée de la chaîne alimentaire si le vétérinaire sanitaire la juge non conforme sur des critères sanitaires).
Ce qu'il faut savoir, c'est qu'en France, les animaux ne sont pas percutés avant d'être égorgés dans l'abattage rituel : il est donc nécessaire d'utiliser des sortes de cages de contention qui permettent la manipulation des animaux conscients (on ne les pend pas conscients par les jarrets avant de les égorger évidemment!!). Hormis les rituels religieux, l'absence d'étourdissement préalable à la saignée est la SEULE différence "technique" entre l'abattage rituel et l'abattage traditionnel.
A noter que curieusement cette tolérance française est variable en fonction des pays européens, par exemple en Allemagne, les animaux sont percutés même dans la chaîne d'abattage rituel (ça ne pose pas de problème pour leur validation religieuse).
Je pense que c'est ce qui rend la viande hallal un peu plus chère : on ne peut pas avoir un "débit" d'abattage aussi important que sur une chaîne traditionnelle di fait de la necessité d'utiliser des cages de contention individuelles.
Donc j'insiste : la viande hallal et la viande "traditionnelle" sont IDENTIQUES sauf pour la première étape de l'abattage en France (et les rituels religieux), les qualité organo-leptiques sont les mêmes.
Pour les petits ruminants, ils ne sont pas percutés mais électrocutés entre 2 électrodes fixes dans l'abattage traditionnel, c'est plus rapide et plus simple pour ce format d'animal. idem en abattage rituel, on utilise des cages de contention et en France, il n'y a pas d'étourdissement préalable.
(pour info les porcs sont gazés au CO2 dans des abattoirs spéciaux, on les mets à plusieurs dans une sorte de nacelle qui descend dans une fosse à CO2, cette espèce étant particulièrement sensible au stress -qui rend la viande immangeable par des réactions complexes-, le fait d'être en groupe les rassure. Il n'y a bien sûr pas d'abattage rituel pour cette espèce.)
Il faut savoir que c'est l'avant-main (de la tête au nombril schématiquement) qui est valorisé dans les filières hallal et casher, alors que chez le boucher traditionnel c'est l'arrière-main qui rapporte le plus (les "steaks"!) : on ne jette évidemment pas la moitié de la carcasse, il est donc courant que des animaux provenant de l'abattage rituel se retrouve valorisés en filière traditionnelle sans que ce soit forcément noté sur l'étiquette.
pour ceux que ça intéresse, le site de la chaire d'hygiène et sécurité alimentaire de l'ENVL où on trouve un powerpoint sur l'hygiène de l'abattage-habillage qui permet de visualiser les différentes étapes (accès libre, mais âme sensible s'abstenir, on est encore loin de la viande en barquette aseptisée "Barbie fait ses courses chez le boucher").
Alors soyons clairs, je ne vais pas porter de jugement sur l'aspect spirituel de l'abattage rituel : ce n'est pas le lieu et je ne suis pas du tout habilitée!
Par contre, en tant que vétérinaire, je peux essayer d'apporter des éléments d'information sur ce que recouvre le terme d'abattage rituel. Mes cours de sécurité sanitaire des aliments ainsi que ma visite de l'abattoir départemental commencent à dater un peu, je fais donc confiance aux vétérinaires sanitaires vacataires ou non des abattoirs pour corriger les éventuelles approximations.
Prenons l'exemple des bovins : un abattage, comment ça se passe?
les animaux arrivent à l'abattoir, ont un délai de repos légal (en bref, ils ne sont pas abattus dès leur descente de camion!) dans une stabulation attenante à l'abattoir. Le vétérinaire de l'abattoir fait ensuite une visite rapide des animaux, car les animaux visiblement malades ne rentrent pas sur la chaîne d'abattage.
Ensuite la chaîne d'abattage est lancée, au cours de laquelle les bovins sont assommés (avec une sorte de masse, avant on utilisait une sorte de pistolet à pointe qui perforait le crâne mais avec les histoires de vache folle, on ne touche plus l'encéphale pour ne pas risquer de contaminer la carcasse), ensuite suspendus sur des crochets, ensuite saignés, ensuite le cuir est retiré, les extrémités coupées, l'intestin ligaturé, ensuite vidés des organes internes, ensuite coupés en 2 dans le sens de la longueur, ensuite inspectés par le vétérinaire sanitaire qui appose un tampon indélébile sur la carcasse certifiant la conformité organoleptique de la viande. Ensuite les carcasses passent au frigo, et après une période de maturation différente selon les morceaux elles seront vendus. (entre parenthèses, les abats sont aussi inspectés).
Il faut savoir que ces différentes étapes sont extrèmement rapides et se réalisent à la chaîne, un technicien d'abattoir à chaque poste, de mémoire entre la percussion et la découpe en 2 de la carcasse c'est moins de 20 minutes (enfin, ça donne cette impression, quand on voit à la fin les 1/2 carcasses encore fumantes et avec des trémulations musculaires!).
A savoir : on ne peut pas saigner un animal mort! "saigner" veut dire vider le sang, si la pompe ne fonctionne plus (=le coeur), vous ne saignez pas grand chose et la viande a un aspect tout différent (pensez au gibier par exemple, si vous avez de la famille qui chasse). La viande bovine a beau être "rouge", elle est saignée comme la viande "blanche" du poulet. L'étape de percussion sert donc à rendre inconscient l'animal avant son égorgement.
Dans les abattoirs français, il y a une salle spécifique pour l'abattage rituel (juif et musulman). Cet abattage est supervisé par des responsables religieux de ces 2 religions -les rites sont similaires-, ils prononcent des prières durant l'abattage, des instruments spécifiques sont utilisés (c'est une sorte de sabre par exemple qui est utilisé pour l'égorgement dans le rituel juif), l'orientation spatiale des animaux est importante etc. A la fin, un tampon est apposé sur la carcasse certifiant le respect du code religieux lors de l'abattage, mais il faut savoir que c'est le tampon sanitaire qui prime (une carcasse "religieusement" conforme sera éliminée de la chaîne alimentaire si le vétérinaire sanitaire la juge non conforme sur des critères sanitaires).
Ce qu'il faut savoir, c'est qu'en France, les animaux ne sont pas percutés avant d'être égorgés dans l'abattage rituel : il est donc nécessaire d'utiliser des sortes de cages de contention qui permettent la manipulation des animaux conscients (on ne les pend pas conscients par les jarrets avant de les égorger évidemment!!). Hormis les rituels religieux, l'absence d'étourdissement préalable à la saignée est la SEULE différence "technique" entre l'abattage rituel et l'abattage traditionnel.
A noter que curieusement cette tolérance française est variable en fonction des pays européens, par exemple en Allemagne, les animaux sont percutés même dans la chaîne d'abattage rituel (ça ne pose pas de problème pour leur validation religieuse).
Je pense que c'est ce qui rend la viande hallal un peu plus chère : on ne peut pas avoir un "débit" d'abattage aussi important que sur une chaîne traditionnelle di fait de la necessité d'utiliser des cages de contention individuelles.
Donc j'insiste : la viande hallal et la viande "traditionnelle" sont IDENTIQUES sauf pour la première étape de l'abattage en France (et les rituels religieux), les qualité organo-leptiques sont les mêmes.
Pour les petits ruminants, ils ne sont pas percutés mais électrocutés entre 2 électrodes fixes dans l'abattage traditionnel, c'est plus rapide et plus simple pour ce format d'animal. idem en abattage rituel, on utilise des cages de contention et en France, il n'y a pas d'étourdissement préalable.
(pour info les porcs sont gazés au CO2 dans des abattoirs spéciaux, on les mets à plusieurs dans une sorte de nacelle qui descend dans une fosse à CO2, cette espèce étant particulièrement sensible au stress -qui rend la viande immangeable par des réactions complexes-, le fait d'être en groupe les rassure. Il n'y a bien sûr pas d'abattage rituel pour cette espèce.)
Il faut savoir que c'est l'avant-main (de la tête au nombril schématiquement) qui est valorisé dans les filières hallal et casher, alors que chez le boucher traditionnel c'est l'arrière-main qui rapporte le plus (les "steaks"!) : on ne jette évidemment pas la moitié de la carcasse, il est donc courant que des animaux provenant de l'abattage rituel se retrouve valorisés en filière traditionnelle sans que ce soit forcément noté sur l'étiquette.
pour ceux que ça intéresse, le site de la chaire d'hygiène et sécurité alimentaire de l'ENVL où on trouve un powerpoint sur l'hygiène de l'abattage-habillage qui permet de visualiser les différentes étapes (accès libre, mais âme sensible s'abstenir, on est encore loin de la viande en barquette aseptisée "Barbie fait ses courses chez le boucher").
D'autres sites à visiter :
-abattagerituel.com (attention, je ne cautionne pas la campagne de pub, et l'absence de photos "réalistes" sur l'abattage conventionnel alors qu'il y en a sur l'abattage rituel me gêne. En revanche, les articles cités sont intéressants à lire, notamment sur la proportion de viande "rituelle" qui se retrouve dans la filière "conventionnelle").